Chenilles processionnaires : gare aux poils urticants !
Dans les forêts ou les jardins, au sol ou sur les branches des arbres, certaines chenilles se déplaçent en file indienne. Ces chenilles, appelées processionnaires, sont des insectes aux poils urticants, qui peuvent entraîner des réactions inflammatoires parfois graves chez les humains ou les animaux.
Les chenilles processionnaires : qu’est-ce que c’est ?
Les chenilles processionnaires du pin (Thaumetopoea pityocampa) et les chenilles processionnaires du chêne (Thaumetopoea processionea) sont des insectes qui vivent en colonie. La première colonise des résineux de la famille des pins (pin noir, pin laricio, pin sylvestre, pin d’Alep, pin maritime, cèdre de l’Atlas…) et la seconde des feuillus de la famille des chênes (chêne sessile, chêne pédonculé…). On les surnomme « processionnaires » car elles se déplacent en file indienne.
Les chenilles processionnaires du pin sont brun orangé et celles du chêne gris argenté. Elles mesurent jusqu’à quatre centimètres de long à la fin de leur croissance. Elles peuvent cependant être difficiles à différencier en dehors de leur habitat.
Où et quand les retrouver ?
La chenille processionnaire du pin est présente sur une très large partie du territoire français, essentiellement dans le Sud, le centre et l’Ouest. Son aire de distribution s’étend depuis les années 1960 vers le nord et l’ouest du pays. On la croise majoritairement entre janvier et mai mais également entre octobre et décembre dans les régions océaniques.
La chenille processionnaire du chêne est essentiellement présente dans le nord-est, la région parisienne et le nord-ouest de la France et peut être présente dans des régions du sud. Son aire de répartition s’étend vers l’ouest. On l’observe majoritairement entre avril et juillet.
Quels sont les symptômes ?
Les chenilles processionnaires sont urticantes par leurs poils qui sont en fait des soies détachables. La pénétration de de ces soies urticantes dans la peau ou dans les muqueuses entraîne la libération d’un venin composé de différentes molécules responsables de réactions toxiques. Celles-ci peuvent provoquer des réactions inflammatoires notamment sur la peau (rougeurs, démangeaisons, douleur cutanée, œdème localisé, urticaire et parfois petites cloques), les yeux : (conjonctivite, larmoiement, douleur oculaire) ou les voies respiratoires (toux, gêne respiratoire).
En cas d’exposition répétée, le venin contenu dans ces soies urticantes peut provoquer des allergies, pouvant mener à une baisse brutale de la tension artérielle, un malaise ou une perte de connaissance.
Il n’est pas nécessaire d’être en contact avec une chenille pour présenter des symptômes : ses soies urticantes qui se détachent suite à un contact mécanique ou lorsque la chenille se sent agressée, sont transportées très facilement sous l’effet du vent.
L’Anses, avec les centres antipoison, a analysé les différents cas d’effets indésirables liés aux poils urticants de chenilles processionnaires enregistrés entre janvier 2012 et juillet 2019. Les résultats sont disponibles dans Vigil’Anses de novembre 2019 (PDF).
Comment faire pour se protéger des chenilles processionnaires ?
Afin de limiter les risques d’intoxication liées aux chenilles processionnaires, voici quelques conseils :
- ne pas s’approcher et ne pas toucher les chenilles ou leur nid, en particulier pour les enfants ;
- se tenir à distance des arbres porteurs de nids ;
- porter des vêtements longs en cas de promenade en forêt ou près d’arbres infestés ;
- éviter de se frotter les yeux pendant ou au retour d’une balade ;
- bien laver les fruits et les légumes de son jardin en cas d’infestation à proximité ;
- éviter de faire sécher le linge à côté d’arbres infestés ;
- en cas de suspicion d’exposition aux chenilles, prendre une douche et changer de vêtements ;
- en cas de signes d’urgence vitale (détresse respiratoire…), appeler le 15 ou consulter aux urgences ;
- en cas de signes d’intoxication, consulter un médecin ou appeler un centre antipoison;
- si contact avec la chenille, photographier la chenille pour en faciliter l’identification ;
- si des animaux domestiques sont touchés, consulter un vétérinaire ou appeler un centre antipoison vétérinaire (Centre antipoison animal et environnemental de l’Ouest et Centre national d’informations toxicologiques vétérinaires).
> Consultez notre plaquette sur les chenilles processionnaires (PDF).
Quelles sont les conséquences pour les animaux ?
Les chenilles processionnaires du chêne et du pin sont à l’origine de cas d’intoxications chez différentes espèces animales. Les cas d’exposition déclarés concernent presqu’exclusivement la processionnaire du pin : les chiens représentent 92% des cas et les chats environ 7 % des cas. À la différence des cas humains, les lésions chez les animaux se situent principalement au niveau de la cavité buccale. Ceci est dû au mode d’exposition : léchage, prise en gueule de chenilles par les chiens, ingestion par les chevaux et les ruminants de végétaux contaminés. Une complication majeure est la nécrose plus ou moins étendue de la langue, qui peut être prévenue ou limitée par une prise en charge médicale très rapide de l’animal. Des lésions des pattes et du système digestif peuvent également survenir.
Quel impact pour les arbres et l’exploitation des forêts ?
Les chenilles processionnaires, par leur régime alimentaire phytophage, peuvent entraîner des pertes de feuilles importantes. Leur impact sur la production sylvicole demeure marginal. Cependant, la processionnaire du pin peut induire un retard de croissance des pins infestés. Les deux espèces de chenilles peuvent également provoquer indirectement des dépérissements de certains peuplements en cas de défoliation importante : les arbres sont fragilisés et peuvent être exposés à des ravageurs secondaires, par exemples des insectes xylophages.
Quels sont les moyens de lutte contre ces chenilles ?
Il existe des moyens de lutte préventifs contre la processionnaire du pin, par la diversification des essences forestières. Cette approche repose sur la plantation de plantes non hôtes qui ne constituent pas une source de nourriture pour les chenilles.
Des moyens de lutte curatifs, essentiellement mécaniques existent :
- La destruction des nids par des professionnels équipés, si les arbres sont peu nombreux, faciles d’accès et de faible hauteur,
- La pose de pièges à chenilles contre la chenille processionnaire du pin : des colliers peuvent être mis autour des troncs avant l’hiver, saison où les chenilles descendent des pins pour s’enfouir au sol.
Des produits insecticides, à base d’extraits de Bacillus thuringiensis subsp. kurstaki ou de spinosad, existent pour lutter contre les chenilles processionnaires. Cependant, ceux-ci sont autorisés en France uniquement en tant que produits phytopharmaceutiques, c’est-à-dire pour protéger les végétaux. Pour qu’ils puissent être utilisés pour la santé humaine ou animale, il faudrait que ces produits bénéficient d’une autorisation de mise sur le marché en tant que produit biocide.
En janvier 2023, l'Anses a réalisé une expertise sur le risque sanitaire lié à l’exposition à ces chenilles et travaillé sur des mesures de gestion et de lutte appropriées à mettre en œuvre, en prenant en compte l’analyse de l’efficacité des méthodes de lutte préventives et curatives disponibles.